Plusieurs voix de représentants politiques des Français de l’étranger s’élèvent ces dernières semaines contre le manque de considération vis-à-vis des expatriés dont fait preuve, à leurs yeux, le gouvernement. Loin des yeux, loin du cœur ? Alors qu’ils ont voté en masse pour Emmanuel Macron à l’élection présidentielle et élu à l’Assemblée nationale dix députés La République en marche dans leurs onze circonscriptions, les Français de l’étranger ont le sentiment d’être déconsidérés par le gouvernement d’Édouard Philippe. « Dans le discours du président de la République à Versailles, comme dans le discours de politique générale du Premier ministre, on ne trouve aucune mention aux Français de l’étranger. C’est un silence pesant qui s’est abattu cette semaine sur nos deux millions de compatriotes », a ainsi écrit Boris Faure, conseiller consulaire des Français de Belgique, vendredi 7 juillet, dans une tribune publiée sur Le Petit Journal, intitulée « La marginalisation des Français de l’étranger est En Marche ». Premier grief : il n’y a plus, au sein du gouvernement, de secrétaire d’État dédié aux Français de l’étranger. Créée par Nicolas Sarkozy en 2011, la fonction avait été maintenue durant le quinquennat de François Hollande et avait une réelle utilité, à en croire Hélène Conway-Mouret, sénatrice (PS) des Français de l’étranger, qui occupa le poste entre juin 2012 et mars 2014. « J’ai réformé la représentation politique des Français de l’étranger, l’aide apportée aux familles en matière de bourses scolaires, j’ai lancé la numérisation des services consulaires. Tous ces chantiers ont besoin d’une impulsion politique, affirme l’ancienne ministre déléguée, contactée par France 24. Aujourd’hui, le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, ne dispose que d’un seul secrétaire d’État, sans attribution spécifique. Il n’y aura donc personne pour mener une réflexion en profondeur et s’inscrire dans le temps sur les sujets qui préoccupent les Français de l’étranger. » Les coupes budgétaires, dont les décrets ont été publiés le 21 juillet au Journal officiel, sont une autre source d’inquiétude. Pour le programme « Français de l’étranger et affaires consulaires », 12,1 millions d’euros en autorisation d’engagement (AE) et 10,4 millions d’euros en crédits de paiement (CP) ont été annulés pour 2017, tandis que 60 millions d’euros en AE et CP ont également été effacés du programme « Diplomatie culturelle et d’influence », correspondant notamment à une partie de la subvention versée à l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE). Concrètement, cela devrait entraîner des économies de fonctionnement pour les services consulaires et, donc, des délais d’attente allongés pour les diverses démarches administratives (renouvellement de passeport, etc.) assurées par les représentations françaises à l’étranger. Les écoles françaises – déjà très onéreuses dans certains pays – pourraient, elles, être tentées d’augmenter leurs frais d’inscription afin de compenser la diminution des subventions. Certains reprochent aussi la volonté du gouvernement de supprimer la réserve parlementaire – cette somme d’argent que pouvait distribuer à sa guise chaque député et chaque sénateur. « Au-delà des abus auxquels il était indispensable de remédier, la réserve remplissait une fonction extrêmement utile, non seulement en France, en faveur de toutes petites collectivités, mais aussi et surtout à l’étranger. Parce que les budgets alloués par le Quai d’Orsay ne cessent de se réduire, certains services publics à nos compatriotes reposent dorénavant largement sur des associations – que ce soit pour l’accès à l’enseignement ou l’aide sociale », estime Joëlle Garriaud-Maylam, sénatrice (LR) des Français de l’étranger, dans une tribune publiée le 14 juillet sur Atlantico. Pour Hélène Conway-Mouret, ces mauvais signaux envoyés aux Français établis hors de France sont en contradiction avec le tropisme international affiché par Emmanuel Macron. « Les Français de l’étranger, c’est la place de la France dans la mondialisation, estime la sénatrice. Le chef de l’État est très actif sur la scène internationale et veut voir la France rayonner à l’étranger. Or, notre relance économique passe par l’international et il y a jusqu’ici un décalage entre les discours et la réalité des choix purement comptables effectués qui me gêne. » Un sentiment partagé par la plupart des représentants des Français de l’étranger qui préviennent : si le réseau éducatif, culturel et diplomatique français à travers le monde est en souffrance, la belle image d’une France qui rayonne à l’étranger, que veut promouvoir Emmanuel Macron, sera vite ternie.